mercredi 17 avril 2024

La veille et l'intelligence économique au service de l'action publique.

Face à un contexte difficile et une profusion d'informations, de désinformations, fake-news... qui parfois fondent les opinions, à tort ou à raison, des outils comme la veille ou l'intelligence économique peuvent aider, de par leur approche prospective, stratégique ou évaluative.

Cheikh Mbacké SENE, Expert en Communication stratégique, Veilles
 & intelligence économique  - Doctorant en administration des affaires

Le nouveau régime du Sénégal qui cristallise tous les espoirs du pays en majorité jeune, veut incarner la rupture. Il sort héros de cette troisième alternance démocratique dans un contexte complexe à tous égards. Des considérations géopolitiques à celles politiques, en passant par la situation socioéconomique difficile, le régime peut mesurer le lourd fardeau de l'héritage : un cotexte géopolitique qui requiert la vigilance, une conjoncture internationale et une société Sénégalaise engluée dans une crise à deux dimensions à savoir socioéconomique et politique. 

A l'image de toutes les sociétés modernes, le Sénégal est à l'air des technologies et des réseaux sociaux. Le pays est en effet en proie à la profusion de connaissances, informations, analyses, discours, avis… souvent pluriels et contradictoires. Les technologies de communication facilitent leurs productions, circulations et accès. L'abondance des opinions de plus en plus multiformes, la profusion d’informations, l'incertitude informationnelle et l'avènement et la densification des réseaux sociaux sont autant de facteurs qui complexifient les interactions (échanges et perceptions) entre gouvernants et gouvernés et conditionnent entre autres les opinions. Puis à sources nombreuses et diverses, fusent des connaissances et commentaires sur des sujets de plus en plus nombreux et précis. Cette surcharge informationnelle (« infobésité ») crée des redondances, des divergences et du doute, voire des rumeurs. De nombreux sujets donnent lieu à des amplifications médiatiques, à des approximations qui circulent à contre courant de la ligne de communication ou du moins des attentes du gouvernement. Le doute permanent, même reposant sur de la désinformation, finit par avoir un impact négatif et altère la confiance de l'opinion.   

Trouver des moyens de recréer la confiance face aux informations peu ou pas structurées, peu ou pas certifiées. 

Dans ce contexte, les gouvernants sont confrontés à plusieurs défis : suivre des sujets de plus en plus nombreux, dans les domaines multiples qui forment la gestion de  l'Etat au sens élargi du terme. Le volume des contenus, en particulier dématérialisés, augmente de façon rapide, avec de plus en plus d’informations peu ou pas structurées, peu ou pas certifiées. La veille et l'intelligence économique ont tout leur sens face a une telle situation. La veille et l'intelligence économique sont par excellence des outils avant-gardiste pour lutter contre ces dérives : contrôle, traçabilité des données, débats publics et controverses, factchecking, etc. Ces garde‑fous recréent la confiance informationnelle nécessaire, en particulier, aux acteurs publics et aux décideurs.  La veille et l'intelligence économique  permettent  de recréer la confiance informationnelle nécessaire  par une démarche axée sur une approche prospective, stratégique ou évaluative peut aider à y faire face. Les activités de veille et d'intelligence économique apportent des réponses à une partie de ces enjeux, par l’identification, la sélection, l’analyse et la mise à disposition d’informations clés. La rupture annoncée ne saurait être menée sans une approche prospective, stratégique ou évaluative que seule la veille stratégique et l'intelligence économique peuvent permettre de réussir.
 
Cheikh Mbacké SENE 
Expert en Communication stratégique, Veilles & intelligence économique 
Doctorant en administration des affaires au School of Business and Economics,  
Atlantic International (Hawaï, USA) 
Ancien Conseiller Technique  
Mobile:+221 78 019 22 64   
Email : cmbacke.sene@gmail.com 

vendredi 12 avril 2024

L’alternance, une opportunité pour bâtir une économie plus résiliente face à la récurrence des crises.




L'alternance observée par le Sénégal peut être une aubaine pour le Sénégal qui a à cœur de changer son fusil d'épaule en ce qui concerne les questions économiques. Il est plus que jamais nécessaire et vital d'avoir une économie forte qui, à la fois, répond aux attentes internes et fait fi de solidité face aux chocs exogènes. 

Depuis 2008, les économies du monde subissent des chocs d'origines diverses récurrents et rapprochés. De la crise des subprimes à la guerre en Ukraine en passant par la maladie à virus Ebola ou encore la pandémie du Covid 19, l'échiquier économique mondial dans son ensemble a subi des dérèglements récurrents inattendus qui se sont répercutés sur les micro économies à l'échelle planétaire. Si la question qui préoccupe au premier plan demeure celle de faire face à chaque choc ou à la limite de les anticiper un à un, celle de l'essoufflement économique du fait de la prolifération et du rapprochement des crises semble être reléguée au second plan. Pourtant, aussi outillé et prévenant qu'on puisse être, cette récurrence laisse forcément des séquelles même aux économies les plus fortes, à plus forte raison celles les plus faibles.  

L'économie, une équation aux inconnus relatifs 

Si un changement de paradigme a pu se produire aux lendemains de la crise des subprimes sur fond de réorganisation économique avec des fondamentaux à la fois plus éthiques et plus sécuritaires, force est de reconnaître que les "nouvelles approches économiques" n'ont pas eu la largesse de se consolider au point d'être inébranlables et même de résister à des chocs de moindre envergure, si ces derniers sont récurrents et rapprochés. 

La pandémie du Covid a mis à nu une vulnérabilité jusque-là insoupçonnée de nos pays et de nos économies, plongeant tous les gouvernements du monde (Pékin et Washington en premiers) dans une prise de conscience des limites humaines face à certains aléas endogènes et exogènes. La lame de fond qui est partie de la Chine a ébranlé la grande puissance asiatique la plongeant dans une profonde dépression économique et structurelle, eu égard à la chute des commandes extérieures, l'inactivité durable, les immenses pertes en ressources humaines... 

Des plus puissants aux plus faibles, le Covid a mis a nu la vulnérabilité d'un système économique international qui sonne peut-être aussi le glas de ses interdépendances. Mais encore faudrait-il que les gouvernements en prennent véritablement conscience pour changer - encore une fois - de paradigme. L'intégration de l'éthique pour humaniser l'économie et réparer les erreurs qui ont conduit à la crise des subprimes n'a pas suffit à sauvegarder nos économies face aux velléités à caractères divers.  Le Covid et la guerre en Ukraine ont mis à rude épreuve les économies et modes de vies des populations à échelle planétaire, remettant à l'ordre du jour les questions de la digitalisation, de la souveraineté alimentaire, de la souveraineté économique... Si l'interdépendance pouvait avoir ses vertus solidaires, force est de reconnaître aussi qu'elle a ses inconvénients. 

Changement de paradigme comme maître-mot

Le monde change, les Etats et les populations doivent s'en accommoder en usant de nouvelles stratégies sociétales, de nouveaux modes de vie et de nouvelles approches économiques pour résister aux multiples engrenages, de surcroît répétitifs. Réformer et réinventer les économies par les technostructures et par les politiques d'exploitation industrielle, investir des pans et segments entiers sur les chaînes de valeur des secteurs clefs créateurs de valeurs et porteurs d'emplois, faire une intelligence économique de ses besoins pour des stratégies de production et de productivité propres et les plus indépendants possibles. Les questions énergétiques doivent être bien posées pour migrer vers des alternatives propres et surtout moins coûteuses, les technologies convenablement exploitées pour en faire de leviers accélérateurs de croissance et l'industrialisation de nos pays doivent poser leur regard sur celle 4.0 de par des raccourcis intelligents qui ne relèguent pas forcément les ressources humaines au second plan (sauvegarde des emplois), sous une alchimie qui répond à la fois au nouveau paradigme. Celui-là même qui s'impose pour nous permettre d'atténuer les impacts de l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes. 


 

vendredi 3 juin 2022

Comment éviter l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes?



Cheikh Mbacké SENE, 
Expert en Communication sensible, intelligence économique et analyste économique

Depuis 2008, les économies du monde subissent des chocs d'origines diverses récurrents et rapprochés. De la crise des subprimes à la guerre en Ukraine en passant par la maladie à virus Ebola ou encore la pandémie du Covid 19, l'échiquier économique mondial dans son ensemble a subi des dérèglements récurrents inattendus qui se sont répercutés sur les micro économies à l'échelle planétaire. Si la question qui préoccupe au premier plan demeure celle de faire face à chaque choc ou à la limite de les anticiper un à un, celle de l'essoufflement économique du fait de la prolifération et du rapprochement des crises semble être reléguée au second plan. Pourtant, aussi outillé et prévenant qu'on puisse être, cette récurrence laisse forcément des séquelles même aux économies les plus fortes, à plus forte raison celles les plus faibles.  


L'économie, une équation aux inconnus relatifs 

Si un changement de paradigme a pu se produire aux lendemains de la crise des subprimes sur fond de réorganisation économique avec des fondamentaux à la fois plus éthiques et plus sécuritaires, force est de reconnaître que les "nouvelles approches économiques" n'ont pas eu la largesse de se consolider au point d'être inébranlables et même de résister à des chocs de moindre envergure, si ces derniers sont récurrents et rapprochés. 

La pandémie du Covid a mis à nu une vulnérabilité jusque-là insoupçonnée de nos pays et de nos économies, plongeant tous les gouvernements du monde (Pékin et Washington en premiers) dans une prise de conscience des limites humaines face à certains aléas endogènes et exogènes. La lame de fond qui est partie de la Chine a ébranlé la grande puissance asiatique la plongeant dans une profonde dépression économique et structurelle, eu égard à la chute des commandes extérieures, l'inactivité durable, les immenses pertes en ressources humaines... 

Des plus puissants aux plus faibles, le Covid a mis a nu la vulnérabilité d'un système économique international qui sonne peut-être aussi le glas de ses interdépendances. mais encore faudrait-il que les gouvernements en prennent véritablement conscience pour changer - encore une fois - de paradigme. L'intégration de l'éthique pour humaniser l'économie et réparer les erreurs qui ont conduit à la crise des subprimes  n'a pas suffit à sauvegarder nos économies face aux velléités à caractères divers.  Le Covid et la guerre en Ukraine ont mis à rude épreuve les économies et modes de vies des populations à échelle planétaire, remettant à l'ordre du jour les questions de la digitalisation, de la souveraineté alimentaire, de la souveraineté économique. Si l'interdépendance pouvait avoir ses vertus solidaires, force est de reconnaître aussi qu'elle a ses inconvénients. 


Changement de paradigme comme maître-mot

Le monde change, les Etats et les populations doivent s'en accommoder en usant de nouvelles stratégies sociétales, de nouveaux modes de vie et de nouvelles approches économiques pour résister aux multiples engrenages, de surcroît répétitifs. Réformer et réinventer les économies par les technostructures et par les politiques d'exploitation industrielle, investir des pans et segments entiers sur les chaînes de valeur des secteurs clefs créateur de valeurs et porteurs d'emplois, faire une intelligence économique de ses besoins pour des stratégies de production et de productivité propres et les plus indépendants possibles. Les questions énergétiques doivent être bien posées pour migrer vers des alternatives propres et surtout moins coûteuses, les technologies convenablement exploitées pour en faire de leviers accélérateurs de croissance et l'industrialisation de nos pays doivent poser leur regard sur celle 4.0 de par des raccourcis intelligents qui ne relègue pas forcément les ressources humaines au second plan (sauvegarde des emplois), sous une alchimie qui répond à la fois au nouveau paradigme. Celui-là même qui s'impose pour nous permettre d'atténuer les impacts de l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes. 

mardi 12 avril 2022

La souveraineté économique : l'autonomie stratégique par l'édification de fédérations sectorielles et un patronat unis et forts.


Cheikh Mbacké SENE, Expert en intelligence économique, 
Doctorant au School of Business and Economics Atlantic International University (USA) 

L'appel du Chef de l'Etat SEM. Macky Sall pour une souveraineté alimentaire est une piqûre de rappel de ce passage obligé pour atteindre l'émergence. Les progrès infrastructurels - aussi importants qu'ils puissent être - ne suffisent pas à entériner l'émergence d'un pays si les questions économiques et alimentaires restent en suspens. La pandémie du Covid 19 et la conjoncture internationale émanant de la guerre en Ukraine ont conduit au premier plan les questions de souveraineté alimentaire et économique.

Après avoir expliqué dans ma précédente tribune que l'enjeu de la souveraineté alimentaire en appelle impérativement à une réflexion plus globale, laquelle va au-delà de la seule question de la sécurité et de l'autosuffisance, j'en viens à la souveraineté économique convaincu de la double inhérence plus que de la relation corrélative entre celle-ci et celle alimentaire. Mais là encore il faut de la prudence dans l'approche. Le problème du Sénégal est plus une question de souveraineté économique qu'alimentaire. Une fois qu'on est convaincu de cela, il conviendrait de se pencher sur la question du contenu à mettre dans la souveraineté économique, suite à l'entendement très déterminant par rapport à l'atteinte des objectifs potentiellement recherchés.

Sous un angle littéral, la souverainetééconomique devrait logiquement conduire à un retour vers une autarcie économico-financière. Seulement, cette approche mercantiliste conduirait sans équivoque le pays hors du système économique international. Une impasse économique qui, en définitive, serait contradictoire aux objectifs de souveraineté économique réellement recherchés.


Une "autonomie stratégique" pour éviter le piège de l'autarcie économique de l'autonomie économique 


Dans un monde moderne où le commerce inter-États est souvent le salut de la survie économique, l'autarcie au sens stricto sensu est en déphasage. L
’autonomie stratégique, version moderne de l’autarcie, est une approche intermédiaire et ad hoc, qui permet de contourner les risques de la souveraineté économique tel que le mercantilisme, pour ne pas dire l’obsessionpour le déficit de la balance commerciale. 

Ce qui reste à considérer et qui sert de base pour ne pas verser sur des challenges utopiques est de se rendre à l'évidence de quelques réalités et de s'en appuyer pour une stratégie plus efficace. Comprendre d'abord qu'aucun pays ne possède la totalité des ressources dont il a besoin, et qu'il doit donc accepter une forme de dépendance. Une dépendance raisonnable naturellement ! Et ça aussi pour la réussir, il faut un minimum d'efforts endogènes. Ce à quoi correspond l'appel du Chef de l'Etat, à savoir renforcer la création de valeur par la production et productivité locale. Depuis 2012 pour ne pas dire 2000, le Sénégal a activé les leviers de base lui permettant de pouvoir procéder à une réinvention - ne serait-ce que partielle - de son économie. Le levier le plus efficace se trouve du côté des réformes structurelles, puis au niveau d'une politique d'aide ciblée (ou de protection). Si la première a été enclenchée au Sénégal et porte déjà ses fruits, la seconde ne trouve pas de terreau pouvant lui servir de réceptacle pour la simple raison que les secteurs sont peu ou pas du tout organisés. Difficile d'apprécier convenablement un secteur pour identifier les vrais besoins, mettre en place une politique et apprécier son coût.

Une aide publique (ou une protection) n'entretient pas éternellement un secteur, peut se justifier temporairement si elle permet de descendre le long de la courbe d’expérience, de se moderniser, d'emprunter un raccourci pour combler un gap. On aura beau théorisé, mais les belles expériences économiques à travers le monde ont démontré que les secteurs peu ou pas organisés ne peuvent être pris en charge et tirés vers le haut. 



La souveraineté stratégiquepasse par l'édification de fédérations sectorielles et un patronat unis et forts.

Des secteurs forts et un patronat uni sont gages de progrès multidimensionnels pas seulement dans la création de valeur, mais dans la réflexion et les conditionnements des politiques sectorielles, industrielles, dans la formation professionnelle, l'employabilité des jeunes, mais aussi dans la création d'emplois. Les fédérations sectorielles peuvent valeureusement se positionner en organes ressources pour les politiques publiques, en clusters boosters, en passerelles professionnelles pour les jeunes, en organes consultatifs pour l'État pour les besoins précités et dans le cadre même de la continuité de la convention Etat-Employeurs. Au Sénégal, plusieurs secteurs sont sous exploités, plombés à la base par un défaut de vision, de politique sectorielle, de manque d'organisation et de soutien. Ce que réussissent la Fédération sénégalaise d'électricité (Feselec) ou encore l'Organisation des professionnels des TIC (Optic) - s'inspirant du modèle marocain - sont très rares au Sénégal. Et là encore deux associations plus structurées ne suffisent point pour disposer d'un patronat fort et organisé. Ni le Mouvement des entreprises du Sénégal (MEDS)ou encore le Conseil national du patronat (CNP).Dire encore que le chemin est encore long. Long mais pas impossible. Les secteurs et filières doivent s'organiser avant que l'État ne décide de les accompagner ou non.

vendredi 8 avril 2022

Souveraineté alimentaire : l'enjeu en appelle impérativement à une réflexion plus globale, qui va au-delà de la seule question de la sécurité et de l'autosuffisance.

Cheikh Mbacké SENE, Expert en intelligence économique, 
Doctorant au School of Business and Economics
Atlantic International University (USA) 


L'appel du Chef de l'Etat SEM. Macky Sall pour une souveraineté alimentaire est une piqûre de rappel de ce passage obligé pour atteindre l'émergence. Les progrès infrastructurels - aussi importants qu'ils puissent être - ne suffisent pas à entériner l'émergence d'un pays. La pandémie du Covid 19 et la conjoncture internationale émanant de la guerre en Ukraine ont conduit au premier plan les questions de souveraineté alimentaire et économique. 


Pour un pays comme le Sénégal, l'enjeu est important si l'on sait que la production locale à tous égards reste très faible et le recours à l'importation permet au pays de couvrir l'essentiel de ses besoins, des produits les plus vitaux à ceux de moindre importance. Avant de revenir sur la question, il importe de souligner que le contexte actuel donne largement raison au Président Macky qui, depuis 2012, insiste sur la nécessité du dopage de la production locale en général et l'autosuffisance alimentaire en particulier. Il a également insisté sur le "Consommer local" plutôt que "manger importé". La hausse des importations alimentaires qui représentent une facture importante et croissante et qui fragilisent non seulement les filières locales, étouffe les finances du pays, contraignant assez souvent ce dernier à lâcher du lest sur la fiscalité (en pensant à l'importateur), à renforcer la compensation et à recourir à l'endettement (en pensant au consommateur). Là, il est venu aussi l'heure de se pencher véritablement à la structuration de systèmes alimentaires territorialisés tant dans la productivité que dans les circuits de distribution parce qu'il est question d'assurer la sécurité et la souveraineté alimentaires.

Dans la réflexion ambiante, l'on est amené à se poser la question du contenu à donner à la souveraineté économique avant la souveraineté alimentaire. Autant on peut penser que la marche vers la souveraineté alimentaire est entravée par le défaut de souveraineté économique, autant on se rend compte que la première peut aussi - avec les correctifs qui s'imposent - aider à tirer la seconde vers la  réussite du challenge. Une relation corrélative avérée dans les deux sens qui en appelle impérativement à une réflexion plus globale, qui va au-delà de la seule question de la sécurité et de l'autosuffisance alimentaire. 

Cheikh Mbacké SENE
Expert en intelligence économique
Doctorant au School of Business and Economics
Atlantic International University (USA) 
 

dimanche 27 février 2022

Conflit russo-ukrainien - Les équations économiques de l'Etat du Sénégal pour ne pas subir.

 

Cheikh Mbacké SENE, Expert en Intelligence économique et Analyste économique

Avec l'exclusion de la Russie de Swift, système financier mondial de référence qui centralise l'essentiel des transactions financières et commerciales, il est évident que le conflit russo-ukrainien n'épargnera pas l'économie mondiale et par inhérence aucun pays. La Russie a un poids géostratégique et économique dans l'échiquier commercial international. Pour le Sénégal, il est clair que, comme je l'ai déjà développé dans ma précédente analyse (impacts du conflit russo-ukrainien sur l'économie sénégalaise), son économie sera éclaboussée directement par le truchement de probable ralentissement dans les coopérations commerciales bilatérales avec les deux pays, mais aussi et surtout indirectement par les conséquences de la flambée du prix du baril et de la surenchère des produits qui en résulte..

A l'image de plusieurs pays, Le Sénégal vit une situation inattendue qui a des effets macroéconomiques sur l'économie lesquels se traduisent par un contrepoids sur ce qui était jusqu'ici considérée comme une reprise poussive, après la conjoncture résultant de la pandémie. La hausse du prix du pétrole entraîne généralement une augmentation du coût des consommations intermédiaires suivie d’un ralentissement de la production et de la productivité. Elle entraîne également un transfert de richesses entre les pays importateurs nets et les pays exportateurs nets de pétrole, un renchérissement des produits de première nécessité sur le marché mondial, une hausse de l’inflation, une baisse de la consommation de biens et de l’investissement, car l’environnement économique est incertain et suspendu à la durée de la guerre. Inutile donc d'expliquer l'impact sur un pays comme le Sénégal qui a une forte dépendance énergétique vis-à-vis des énergies non renouvelables, comme le gaz ou le pétrole. Ce qui a eu pour effet de rendre particulièrement vulnérable son système de production économique.

Comment subir la flambée des coûts énergétiques et maintenir la production et la productivité nationale en bon niveau pour ne pas gêner la reprise en cours? Comment soulager les importateurs pour stabiliser les prix, maintenir la consommation et contenir l'inflation éventuelle ?

Autant de questions auxquelles l'Etat du Sénégal doit faire face, en trouvant les moyens de gérer les surcoûts s'il veut maintenir le prix à la pompe, mais aussi et surtout ceux des denrées de première nécessité, nouvellement redéfinis. Tous les esprits vont naturellement vers la compensation. 

Maintenir la compensation à tout prix, même par le biais d'un endettement supplémentaire.

Pourtant l'incapacité de financement du pays (eu égard à plusieurs investissements structurels lourds) et la faiblesse ou la quasi-inexistence de l'épargne ne sont plus des secrets. Le recours à l'emprunt (endettement) est plus envisageable pour faire face à cette nouvelle donne économique.  

Suivre la logique économique avec des fluctuations des prix nationaux au rythme de celle du prix du baril aura des conséquences socio-économiques terribles sur le pays. Le contexte social pandémique a eu son impact politique aux dernières élections locales. Les bulletins de votes de quatre grandes villes ont porté les stigmates d'un malaise social que le gouvernement est en train de résoudre avec notamment la mesure de la baisse des denrées de première nécessité : le riz, l'huile et le sucre. Ces trois produits sont malheureusement tous importés pour l'essentiel. Il se pose naturellement la question du maintien des nouveaux prix, sachant qu'il y aura forcément de surcoût dans la production, le conditionnement et le transport. Et l'on sait pertinemment que de fortes hausses du prix du pétrole font toujours craindre un ralentissement de l’activité économique. 

A cela s'ajoute, la question du prix du pain qui devra intégrer le fait que les cours du blé atteignent des niveaux record sur les marchés des matières premières agricoles. Cette situation est expliquée par le fait que la mer Noire, zone du conflit où les navires de commerce ne naviguent plus, produit 15 % des volumes de blé mondiaux et exporte 40 % des blés échangés sur la planète. Se rappelant que le prix du pain a été revalorisé il y a à peine deux à trois mois dans un contexte très tendu entre l'Etat, les boulangers et le consommateur. Toutefois, tout dépend des partenaires commerciaux de nos importateurs de blé, s'ils s'approvisionnent aux États-Unis, en Argentine, en Australie ou encore en France, le risque reste toujours existant mais minime. 

Pour rester dans son élan social sans étouffer la reprise économique qui est en cours, l'Etat du Sénégal devra trouver les moyens de maintenir la compensation des produits de première nécessité. Un sacrifice qui devra passer par un endettement supplémentaire ou une redéfinition des priorités. L'Etat peut dores et déjà envisager une restructuration de la compensation pour des solutions plus structurelles avec en préalables des réformes, pourquoi pas instaurer un registre social unique qui permettrait au gouvernement d'aller vers un ciblage plus stratégique. Mais dans l'urgence,  le financement par la dette de la compensation peut contribuer à une croissance soutenue et inclusive.  Une résilience économique qui garantit une stabilité sociale.

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L'exclusion de la Russie du système interbancaire Swift - C'est quoi Swift?

Exclusion from the Swift Interbank System - What is Swift?

Cheikh Mbacke SENE, Expert in Economic Intelligence, Monitoring -Economic analyst - PhD student in business administration (IAU, USA)

Swift (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication), is a platform, created in 1973 (to replace the aging Telex technology) and based in Brussels (Belgium), positioned as a reference tool for global finance and commercial transactions. It is a platform for the transit of payment orders between banks, bank customer funds transfer orders, purchase orders or even the sale of securities. The Swift platform has a standardized messaging system, allowing fast, confidential and inexpensive communication between financial institutions. It brings together more than 11,000 banking and securities organizations, market infrastructures and corporate clients in more than 200 countries and territories.

This sanction, which excludes many Russian banks, will have important consequences. Russia would be the second country after the United States in number of users with some 300 Russian banks and institutions members of the system (70% of the banking sector). More than half of Russian credit organizations are represented in Swift.

To thwart this sanction, Moscow has set up new financial infrastructures for payments, rating or transfers, via a system called SPFS.

However, it is important to know that this exclusion of the Swift interbank system introduces the world to a new conjuncture. To be continued

La veille et l'intelligence économique au service de l'action publique.

Face à un contexte difficile et une profusion d'informations, de désinformations, fake-news... qui parfois fondent les opinions, à tort ...