dimanche 20 juillet 2025

Pourquoi les banques africaines doivent investir dans l’intelligence économique

Dans un monde dominé par l’accélération technologique, la guerre de l’information et la compétition asymétrique, les banques africaines n’ont plus le luxe de naviguer à vue. L’heure n’est plus à la simple réactivité, mais à l’anticipation. À l’ère du big data, des fintechs, des cyberattaques et de l’instabilité géopolitique, seule l’adoption d’une démarche structurée de veille stratégique et d’intelligence économique (IE) peut leur garantir sécurité, performance et influence.

Une urgence dans un environnement à risques multiples

Les menaces se multiplient : cybercriminalité, instabilités monétaires, sanctions extraterritoriales, exigences réglementaires (LCB-FT, Bâle III), émergence des néobanques, guerre des talents numériques, tensions géopolitiques…

Autant de facteurs qui imposent une lecture continue de l’environnement. La veille stratégique permet de capter les signaux faibles, de repérer les mutations à temps, et d’ajuster les décisions en conséquence. L’inaction expose à la surprise stratégique, à la crise réputationnelle, voire à l’exclusion des circuits internationaux.

Mieux connaître ses concurrents, ses alliés, ses vulnérabilités

L’intelligence économique permet aux banques de cartographier leur environnement concurrentiel et relationnel :

  • Qui pénètre le marché ?

  • Quelles alliances émergent ?

  • Quelle est la réelle solvabilité d’un partenaire ?

  • Qui prépare une disruption silencieuse ?

Elle est aussi un levier pour renforcer les dispositifs de conformité, de KYC (Know Your Customer), et de lutte contre les flux financiers illicites.

Sécuriser le patrimoine informationnel : un enjeu de souveraineté

La donnée est désormais l’actif le plus stratégique du secteur bancaire. Pourtant, de nombreuses banques africaines restent exposées aux risques de fuite d’informations, aux rançongiciels, aux intrusions numériques et à la désinformation.

Intégrer l’intelligence économique dans les stratégies de cybersécurité, c’est protéger ses actifs immatériels, ses clients, ses algorithmes, ses décisions. C’est aussi renforcer sa souveraineté face aux ingérences économiques.

Anticiper la transformation technologique

L’essor des fintechs, des cryptomonnaies, des blockchains ou des monnaies numériques de banque centrale (MNBC) impose une veille technologique permanente.

Les banques doivent scruter les brevets, détecter les innovations de rupture, comprendre les nouveaux modèles économiques et capter les tendances d’usage. Ne pas le faire, c’est risquer l’obsolescence stratégique.

Passer à l’action : quels modèles de déploiement choisir ?

Il ne suffit pas d’en parler, il faut structurer l’action. Plusieurs modèles sont envisageables :

  • Modèle centralisé : cellule IE intégrée à la direction stratégie ou risques.

  • Modèle en réseau : référents IE dans chaque direction fonctionnelle, connectés à un comité de veille transverse.

  • Modèle externalisé : recours à des cabinets spécialisés et à des plateformes de veille.

  • Modèle hybride (le plus agile) : combinaison d’une cellule interne, d’outils numériques, et de partenariats ciblés.

Les outils existent : plateformes de veille automatisée, dashboards dynamiques, OSINT, bulletins d’alerte, cartographies des risques, etc.

Faire émerger une culture de l’intelligence économique


Le succès repose sur un facteur clé : la culture interne. Il faut former les équipes, diffuser la logique de veille à tous les niveaux, créer des routines d’analyse partagée, et surtout, nommer un référent IE au plus haut niveau.

Cela permet d’intégrer la veille dans les processus de planification stratégique, d’innovation, de conformité et de gestion de crise.

Une nouvelle ère bancaire appelle une nouvelle vigilance stratégique

L’intelligence économique n’est pas un luxe, en
core moins un gadget. C’est un levier de compétitivité, de souveraineté et de pérennité. Dans un contexte africain où les équilibres sont mouvants et les acteurs multiples, elle est devenue une condition de survie autant qu’un facteur de domination.

Demain, plus encore qu’aujourd’hui, ce ne sont pas les banques les plus riches qui domineront, mais celles qui sauront voir avant les autres, lire entre les lignes, et décider au bon moment.

La balle est dans le camp des dirigeants.

Le temps de l’intelligence économique pour les banques africaines, c’est maintenant.

Comme le rappelait Sun Tzu : « Celui qui connaît l’autre et se connaît lui-même remportera cent batailles. »
À condition, bien sûr, de savoir regarder plus loin, plus tôt, et plus profondément.

Le départ des militaires français du Sénégal n’est pas une victoire : Stratégie, influence, dépendances : le piège d’une « victoire » apparente

L’annonce du retrait définitif des troupes françaises stationnées à Dakar

marque un tournant dans les relations franco-sénégalaises. Pour beaucoup, ce

départ constitue une victoire symbolique : celle d’une souveraineté retrouvée,

d’un affranchissement postcolonial, d’une affirmation de soi face à une

puissance étrangère.


Mais à y regarder de plus près, ce départ ne doit ni masquer nos vulnérabilités

profondes, ni nourrir des illusions de puissance retrouvée. Il nous oblige, au

contraire, à repenser les fondements réels de notre autonomie stratégique, à

questionner nos forces comme nos fragilités, et à projeter le Sénégal dans une

nouvelle ère où l’indépendance proclamée devra devenir indépendance assumée,

consolidée et construite.

1. Un départ symbolique, mais pas stratégique

La base militaire française de Ouakam ne représentait, en vérité, ni une menace

directe pour la souveraineté sénégalaise, ni une pièce centrale du dispositif militaire

national. Sa présence, bien que symboliquement lourde, s’inscrivait dans une logique

de coopération bilatérale, fruit d’un héritage historique mais aussi de choix politiques

assumés depuis les années 1960.

Son démantèlement, voulu par le nouveau pouvoir sénégalais dans un contexte

régional marqué par une montée du sentiment anti-français, relève davantage d’une

affirmation politique que d’un bouleversement stratégique. Car le vrai défi n’est pas

tant le départ de quelques centaines de soldats, mais bien la capacité de l’État

sénégalais à assurer, seul, sa défense, sa sécurité, la stabilité de ses frontières et la

protection de ses ressources.

2. La souveraineté ne se décrète pas : elle se bâtit

Il ne suffit pas de mettre fin à une présence étrangère pour devenir pleinement

souverain. La souveraineté ne se mesure pas à l’absence de l’autre, mais à la

solidité de ses propres moyens. Elle suppose des institutions solides, des choix

clairs, des capacités réelles et une vision stratégique.

Le Sénégal ne peut prétendre à une souveraineté authentique s’il ne dispose pas :

 d’une armée dotée d’une autonomie opérationnelle et technologique,

 d’une capacité nationale de surveillance et de réaction aux menaces,

 d’une diplomatie sécuritaire affirmée dans une région en recomposition

permanente,

 et d’une doctrine de sécurité claire, lisible et adaptée aux nouvelles formes de

conflictualité.


Ce n’est pas en faisant sortir l’autre que l’on entre dans l’histoire. C’est en se dotant

des moyens de durer, de résister, d’anticiper, de décider.

3. Le vrai défi : ne pas substituer une tutelle à une autre

Face au retrait progressif de la France dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest,

certains États ont réorienté leurs alliances vers de nouveaux partenaires. La Russie,

la Chine, la Turquie, les Émirats arabes unis ou encore le Maroc renforcent leur

présence militaire, sécuritaire, économique, parfois idéologique.

Mais le risque est grand de remplacer une dépendance par une autre, au nom d’un

faux rééquilibrage. Se libérer ne consiste pas à changer d’allié, mais à pouvoir choisir

librement ses alliances, dans la clarté des intérêts et la pleine maîtrise de ses

orientations.

Le Sénégal n’a pas besoin de protecteurs. Il a besoin de partenaires respectueux,

d’accords équitables, et d’une stratégie nationale qui définisse clairement ce qui est

négociable — et ce qui ne l’est pas.

4. Ce que le départ ne changera pas

Soyons lucides. Le départ des militaires français ne réduira pas :

 la fragilité de nos zones frontalières,

 l’extension des menaces terroristes en provenance du Sahel,

 les risques liés à la piraterie maritime dans le Golfe de Guinée,

 ni les dynamiques de criminalité transnationale (trafics, orpaillage,

cybermenaces, etc.).

Il ne renforcera pas non plus, par magie :

 nos capacités de projection régionale,

 notre chaîne logistique militaire,

 notre autonomie technologique ou navale,

 ou encore la cohésion entre nos institutions de sécurité et la population.

Ce que change le départ, c’est le regard porté sur nous-mêmes. Il nous oblige à

répondre à une question cruciale : sommes-nous prêts à assumer seuls la

responsabilité de notre sécurité, de nos intérêts vitaux, de notre présence dans les

arènes stratégiques ?

5. Un moment-charnière : repenser notre doctrine de sécurité

Le départ français offre néanmoins une opportunité historique : celle de refonder

notre approche de la sécurité nationale. Cela passe par la définition d’une doctrine

sénégalaise claire, crédible et moderne, articulée autour de plusieurs axes :

 Souveraineté territoriale : redéploiement et modernisation des forces dans

les zones sensibles (Sud, Nord-Est, zones maritimes) ;

 Capacité nationale : investissements accrus dans les équipements, la

formation, la logistique et le commandement ;

 Résilience régionale : renforcement de la coopération avec nos voisins dans

le cadre d’alliances équilibrées (CEDEAO, G5+Sénégal, Afrique de l’Ouest

Atlantique) ;

 Sécurité civile et sociale : intégration des questions de développement, de

cohésion sociale, d’emploi et de gouvernance locale dans la stratégie

sécuritaire.


Ce n’est qu’à ce prix que le Sénégal pourra assumer, seul et avec sérénité, son

destin stratégique.


Conclusion : vigilance et responsabilité

Le départ des troupes françaises n’est pas une victoire. C’est un point d’inflexion. Un

test. Une alerte. Il ne signifie pas que nous avons gagné, mais que nous avons

désormais la responsabilité d’être à la hauteur. À la hauteur de notre histoire. De nos

engagements. De nos ambitions.

Il ne s’agit plus d’accuser, ni de dénoncer. Il s’agit

de prendre en charge, avec

courage, nos propres intérêts. De ne plus déléguer notre sécurité. De ne plus

attendre d’autrui ce que nous pouvons, et devons, faire par nous-mêmes.

Dans un monde où les puissances ne disparaissent pas mais changent de forme, la

seule souveraineté qui vaille est celle que l’on construit

lundi 14 juillet 2025

Terrorisme et développement : quand l’insécurité étouffe l’économie du Sahe



Par Cheikh Mbacké SENE –  

Le bruit des armes couvre désormais les espoirs de croissance. De Bamako à Niamey, de Ouagadougou à Tillabéri, le Sahel paie le prix fort d’une insécurité qui se mue en poison économique.

L’Afrique de l’Ouest sahélienne, longtemps perçue comme une zone de transition et d’opportunités agricoles, énergétiques et minières, est aujourd’hui piégée dans une spirale violente où l’essor économique se heurte frontalement à l’insécurité. L’ombre du terrorisme, qui plane depuis plus d’une décennie sur la région, n’érode pas seulement la stabilité politique : elle étouffe progressivement les fondements mêmes du développement économique.

Croissance en chute libre, investissements en berne

Les conséquences macroéconomiques du terrorisme sont alarmantes. Les pays les plus touchés – Mali, Burkina Faso, Niger – ont vu leur croissance économique s’effondrer en quelques années :

  • En 2018, le Burkina Faso affichait une croissance de 6 %. En 2023, elle n’était plus que de 1,5 %, selon la Banque mondiale.

  • Le Mali est passé d’un rythme de croissance de 5 % à moins de 2 %, plombé par les attaques terroristes et l’instabilité institutionnelle.

  • Le Niger, considéré jusqu’en 2022 comme une économie résiliente, est désormais plongé dans une récession de -4,2 % en 2024, à la suite du coup d’État et des sanctions régionales.

Dans l’ensemble de la zone, les investissements directs étrangers (IDE) ont chuté de plus de 60 % depuis 2018, notamment dans les secteurs minier, énergétique et infrastructurel, selon la CNUCED.


🚧 Projets bloqués, corridors commerciaux asphyxiés

Le terrorisme empêche la mise en œuvre de projets structurants cruciaux pour l’intégration régionale :

  • Le corridor Ouagadougou-Abidjan, vital pour l’exportation du coton et des minerais burkinabè, est régulièrement entravé.

  • Le projet de ligne ferroviaire Niamey-Cotonou, qui devait désenclaver le Niger, est suspendu.

  • Le coût des travaux d’infrastructure a augmenté de 30 à 50 %, du fait des exigences sécuritaires, selon la Banque africaine de développement.

Cette dynamique compromet les ambitions de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), en rendant les échanges plus coûteux, moins sûrs et moins compétitifs.

Agriculture menacée, crise alimentaire amplifiée

Dans une région où plus de 80 % de la population vit de l’agriculture et de l’élevage, l’impact est catastrophique :

  • Près de 10 millions de personnes déplacées ont abandonné terres, bétail et outils de production.

  • Le Burkina Faso a perdu 40 % de sa production céréalière dans le Nord et l’Est.

  • Au Mali, plus de 3 000 marchés ruraux sont fermés ou inaccessibles, privant des centaines de milliers de familles de revenus.

Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) tire la sonnette d’alarme : la crise alimentaire devient structurelle, et non plus conjoncturelle.

Budgets publics sous pression, développement sacrifié

Dans ces États fragiles, la réponse sécuritaire absorbe désormais une part majeure des ressources nationales :

  • Le Burkina Faso consacre 19 % de son budget national à la défense, contre seulement 7 % à la santé.

  • Le Mali a investi près de 550 milliards de FCFA (près de 900 millions USD) dans son effort de guerre en 2023.

  • La dette publique explose : plus de 70 % du PIB pour certains pays, avec un service de la dette devenu insoutenable.

Les budgets consacrés à l’éducation, à la santé et aux infrastructures de base sont rognés, compromettant les fondations du développement humain.

Une économie parallèle sous contrôle terroriste

Autre danger : la captation de filières économiques par les groupes armés terroristes.

  • Orpaillage clandestin, carburant, bétail, contrebande : ces filières alimentent des économies parallèles non taxées.

  • Dans certaines régions (Est du Burkina, centre du Mali, Sud-Ouest du Niger), l’État a perdu toute souveraineté économique.

  • Ces groupes imposent des “impôts” aux populations locales, sapant l’autorité étatique et creusant l’écart entre les zones gouvernées et les zones abandonnées.

Une réponse multidimensionnelle s’impose

L’approche purement sécuritaire a montré ses limites. Pour endiguer le déclin économique du Sahel, il faut oser une stratégie intégrée autour de cinq axes :

  1. Redéploiement des services publics essentiels dans les zones reculées ;

  2. Réinvestissement massif dans l’économie locale (agriculture, artisanat, TPE) ;

  3. Inclusion des jeunes dans les filières économiques, pour réduire le terreau du recrutement djihadiste ;

  4. Lutte contre la corruption et pour la justice sociale, seule garante de la légitimité des États ;

  5. Coordination régionale accrue pour sécuriser les grands axes et relancer les projets d’intégration.

Conclusion : reconstruire la paix par l’économie

L’Afrique de l’Ouest ne peut pas se développer sans sécurité. Mais elle ne pourra pas non plus se sécuriser durablement sans développement. La guerre contre le terrorisme ne sera gagnée que si elle s’accompagne d’une guerre contre la pauvreté, l’exclusion et la marginalisation. Le véritable antidote au chaos reste un État fort, juste et économiquement inclusif.

Car si la guerre empêche le développement, seul le développement peut définitivement mettre fin à la guerre.

mercredi 17 avril 2024

La veille et l'intelligence économique au service de l'action publique.

Face à un contexte difficile et une profusion d'informations, de désinformations, fake-news... qui parfois fondent les opinions, à tort ou à raison, des outils comme la veille ou l'intelligence économique peuvent aider, de par leur approche prospective, stratégique ou évaluative.

Cheikh Mbacké SENE, Expert en Communication stratégique, Veilles
 & intelligence économique  - Doctorant en administration des affaires

Le nouveau régime du Sénégal qui cristallise tous les espoirs du pays en majorité jeune, veut incarner la rupture. Il sort héros de cette troisième alternance démocratique dans un contexte complexe à tous égards. Des considérations géopolitiques à celles politiques, en passant par la situation socioéconomique difficile, le régime peut mesurer le lourd fardeau de l'héritage : un cotexte géopolitique qui requiert la vigilance, une conjoncture internationale et une société Sénégalaise engluée dans une crise à deux dimensions à savoir socioéconomique et politique. 

A l'image de toutes les sociétés modernes, le Sénégal est à l'air des technologies et des réseaux sociaux. Le pays est en effet en proie à la profusion de connaissances, informations, analyses, discours, avis… souvent pluriels et contradictoires. Les technologies de communication facilitent leurs productions, circulations et accès. L'abondance des opinions de plus en plus multiformes, la profusion d’informations, l'incertitude informationnelle et l'avènement et la densification des réseaux sociaux sont autant de facteurs qui complexifient les interactions (échanges et perceptions) entre gouvernants et gouvernés et conditionnent entre autres les opinions. Puis à sources nombreuses et diverses, fusent des connaissances et commentaires sur des sujets de plus en plus nombreux et précis. Cette surcharge informationnelle (« infobésité ») crée des redondances, des divergences et du doute, voire des rumeurs. De nombreux sujets donnent lieu à des amplifications médiatiques, à des approximations qui circulent à contre courant de la ligne de communication ou du moins des attentes du gouvernement. Le doute permanent, même reposant sur de la désinformation, finit par avoir un impact négatif et altère la confiance de l'opinion.   

Trouver des moyens de recréer la confiance face aux informations peu ou pas structurées, peu ou pas certifiées. 

Dans ce contexte, les gouvernants sont confrontés à plusieurs défis : suivre des sujets de plus en plus nombreux, dans les domaines multiples qui forment la gestion de  l'Etat au sens élargi du terme. Le volume des contenus, en particulier dématérialisés, augmente de façon rapide, avec de plus en plus d’informations peu ou pas structurées, peu ou pas certifiées. La veille et l'intelligence économique ont tout leur sens face a une telle situation. La veille et l'intelligence économique sont par excellence des outils avant-gardiste pour lutter contre ces dérives : contrôle, traçabilité des données, débats publics et controverses, factchecking, etc. Ces garde‑fous recréent la confiance informationnelle nécessaire, en particulier, aux acteurs publics et aux décideurs.  La veille et l'intelligence économique  permettent  de recréer la confiance informationnelle nécessaire  par une démarche axée sur une approche prospective, stratégique ou évaluative peut aider à y faire face. Les activités de veille et d'intelligence économique apportent des réponses à une partie de ces enjeux, par l’identification, la sélection, l’analyse et la mise à disposition d’informations clés. La rupture annoncée ne saurait être menée sans une approche prospective, stratégique ou évaluative que seule la veille stratégique et l'intelligence économique peuvent permettre de réussir.
 
Cheikh Mbacké SENE 
Expert en Communication stratégique, Veilles & intelligence économique 
Doctorant en administration des affaires au School of Business and Economics,  
Atlantic International (Hawaï, USA) 
Ancien Conseiller Technique  
Mobile:+221 78 019 22 64   
Email : cmbacke.sene@gmail.com 

vendredi 12 avril 2024

L’alternance, une opportunité pour bâtir une économie plus résiliente face à la récurrence des crises.




L'alternance observée par le Sénégal peut être une aubaine pour le Sénégal qui a à cœur de changer son fusil d'épaule en ce qui concerne les questions économiques. Il est plus que jamais nécessaire et vital d'avoir une économie forte qui, à la fois, répond aux attentes internes et fait fi de solidité face aux chocs exogènes. 

Depuis 2008, les économies du monde subissent des chocs d'origines diverses récurrents et rapprochés. De la crise des subprimes à la guerre en Ukraine en passant par la maladie à virus Ebola ou encore la pandémie du Covid 19, l'échiquier économique mondial dans son ensemble a subi des dérèglements récurrents inattendus qui se sont répercutés sur les micro économies à l'échelle planétaire. Si la question qui préoccupe au premier plan demeure celle de faire face à chaque choc ou à la limite de les anticiper un à un, celle de l'essoufflement économique du fait de la prolifération et du rapprochement des crises semble être reléguée au second plan. Pourtant, aussi outillé et prévenant qu'on puisse être, cette récurrence laisse forcément des séquelles même aux économies les plus fortes, à plus forte raison celles les plus faibles.  

L'économie, une équation aux inconnus relatifs 

Si un changement de paradigme a pu se produire aux lendemains de la crise des subprimes sur fond de réorganisation économique avec des fondamentaux à la fois plus éthiques et plus sécuritaires, force est de reconnaître que les "nouvelles approches économiques" n'ont pas eu la largesse de se consolider au point d'être inébranlables et même de résister à des chocs de moindre envergure, si ces derniers sont récurrents et rapprochés. 

La pandémie du Covid a mis à nu une vulnérabilité jusque-là insoupçonnée de nos pays et de nos économies, plongeant tous les gouvernements du monde (Pékin et Washington en premiers) dans une prise de conscience des limites humaines face à certains aléas endogènes et exogènes. La lame de fond qui est partie de la Chine a ébranlé la grande puissance asiatique la plongeant dans une profonde dépression économique et structurelle, eu égard à la chute des commandes extérieures, l'inactivité durable, les immenses pertes en ressources humaines... 

Des plus puissants aux plus faibles, le Covid a mis a nu la vulnérabilité d'un système économique international qui sonne peut-être aussi le glas de ses interdépendances. Mais encore faudrait-il que les gouvernements en prennent véritablement conscience pour changer - encore une fois - de paradigme. L'intégration de l'éthique pour humaniser l'économie et réparer les erreurs qui ont conduit à la crise des subprimes n'a pas suffit à sauvegarder nos économies face aux velléités à caractères divers.  Le Covid et la guerre en Ukraine ont mis à rude épreuve les économies et modes de vies des populations à échelle planétaire, remettant à l'ordre du jour les questions de la digitalisation, de la souveraineté alimentaire, de la souveraineté économique... Si l'interdépendance pouvait avoir ses vertus solidaires, force est de reconnaître aussi qu'elle a ses inconvénients. 

Changement de paradigme comme maître-mot

Le monde change, les Etats et les populations doivent s'en accommoder en usant de nouvelles stratégies sociétales, de nouveaux modes de vie et de nouvelles approches économiques pour résister aux multiples engrenages, de surcroît répétitifs. Réformer et réinventer les économies par les technostructures et par les politiques d'exploitation industrielle, investir des pans et segments entiers sur les chaînes de valeur des secteurs clefs créateurs de valeurs et porteurs d'emplois, faire une intelligence économique de ses besoins pour des stratégies de production et de productivité propres et les plus indépendants possibles. Les questions énergétiques doivent être bien posées pour migrer vers des alternatives propres et surtout moins coûteuses, les technologies convenablement exploitées pour en faire de leviers accélérateurs de croissance et l'industrialisation de nos pays doivent poser leur regard sur celle 4.0 de par des raccourcis intelligents qui ne relèguent pas forcément les ressources humaines au second plan (sauvegarde des emplois), sous une alchimie qui répond à la fois au nouveau paradigme. Celui-là même qui s'impose pour nous permettre d'atténuer les impacts de l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes. 


 

vendredi 3 juin 2022

Comment éviter l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes?



Cheikh Mbacké SENE, 
Expert en Communication sensible, intelligence économique et analyste économique

Depuis 2008, les économies du monde subissent des chocs d'origines diverses récurrents et rapprochés. De la crise des subprimes à la guerre en Ukraine en passant par la maladie à virus Ebola ou encore la pandémie du Covid 19, l'échiquier économique mondial dans son ensemble a subi des dérèglements récurrents inattendus qui se sont répercutés sur les micro économies à l'échelle planétaire. Si la question qui préoccupe au premier plan demeure celle de faire face à chaque choc ou à la limite de les anticiper un à un, celle de l'essoufflement économique du fait de la prolifération et du rapprochement des crises semble être reléguée au second plan. Pourtant, aussi outillé et prévenant qu'on puisse être, cette récurrence laisse forcément des séquelles même aux économies les plus fortes, à plus forte raison celles les plus faibles.  


L'économie, une équation aux inconnus relatifs 

Si un changement de paradigme a pu se produire aux lendemains de la crise des subprimes sur fond de réorganisation économique avec des fondamentaux à la fois plus éthiques et plus sécuritaires, force est de reconnaître que les "nouvelles approches économiques" n'ont pas eu la largesse de se consolider au point d'être inébranlables et même de résister à des chocs de moindre envergure, si ces derniers sont récurrents et rapprochés. 

La pandémie du Covid a mis à nu une vulnérabilité jusque-là insoupçonnée de nos pays et de nos économies, plongeant tous les gouvernements du monde (Pékin et Washington en premiers) dans une prise de conscience des limites humaines face à certains aléas endogènes et exogènes. La lame de fond qui est partie de la Chine a ébranlé la grande puissance asiatique la plongeant dans une profonde dépression économique et structurelle, eu égard à la chute des commandes extérieures, l'inactivité durable, les immenses pertes en ressources humaines... 

Des plus puissants aux plus faibles, le Covid a mis a nu la vulnérabilité d'un système économique international qui sonne peut-être aussi le glas de ses interdépendances. mais encore faudrait-il que les gouvernements en prennent véritablement conscience pour changer - encore une fois - de paradigme. L'intégration de l'éthique pour humaniser l'économie et réparer les erreurs qui ont conduit à la crise des subprimes  n'a pas suffit à sauvegarder nos économies face aux velléités à caractères divers.  Le Covid et la guerre en Ukraine ont mis à rude épreuve les économies et modes de vies des populations à échelle planétaire, remettant à l'ordre du jour les questions de la digitalisation, de la souveraineté alimentaire, de la souveraineté économique. Si l'interdépendance pouvait avoir ses vertus solidaires, force est de reconnaître aussi qu'elle a ses inconvénients. 


Changement de paradigme comme maître-mot

Le monde change, les Etats et les populations doivent s'en accommoder en usant de nouvelles stratégies sociétales, de nouveaux modes de vie et de nouvelles approches économiques pour résister aux multiples engrenages, de surcroît répétitifs. Réformer et réinventer les économies par les technostructures et par les politiques d'exploitation industrielle, investir des pans et segments entiers sur les chaînes de valeur des secteurs clefs créateur de valeurs et porteurs d'emplois, faire une intelligence économique de ses besoins pour des stratégies de production et de productivité propres et les plus indépendants possibles. Les questions énergétiques doivent être bien posées pour migrer vers des alternatives propres et surtout moins coûteuses, les technologies convenablement exploitées pour en faire de leviers accélérateurs de croissance et l'industrialisation de nos pays doivent poser leur regard sur celle 4.0 de par des raccourcis intelligents qui ne relègue pas forcément les ressources humaines au second plan (sauvegarde des emplois), sous une alchimie qui répond à la fois au nouveau paradigme. Celui-là même qui s'impose pour nous permettre d'atténuer les impacts de l'essoufflement de nos économies face à la récurrence et le rapprochement des chocs exogènes. 

mardi 12 avril 2022

La souveraineté économique : l'autonomie stratégique par l'édification de fédérations sectorielles et un patronat unis et forts.


Cheikh Mbacké SENE, Expert en intelligence économique, 
Doctorant au School of Business and Economics Atlantic International University (USA) 

L'appel du Chef de l'Etat SEM. Macky Sall pour une souveraineté alimentaire est une piqûre de rappel de ce passage obligé pour atteindre l'émergence. Les progrès infrastructurels - aussi importants qu'ils puissent être - ne suffisent pas à entériner l'émergence d'un pays si les questions économiques et alimentaires restent en suspens. La pandémie du Covid 19 et la conjoncture internationale émanant de la guerre en Ukraine ont conduit au premier plan les questions de souveraineté alimentaire et économique.

Après avoir expliqué dans ma précédente tribune que l'enjeu de la souveraineté alimentaire en appelle impérativement à une réflexion plus globale, laquelle va au-delà de la seule question de la sécurité et de l'autosuffisance, j'en viens à la souveraineté économique convaincu de la double inhérence plus que de la relation corrélative entre celle-ci et celle alimentaire. Mais là encore il faut de la prudence dans l'approche. Le problème du Sénégal est plus une question de souveraineté économique qu'alimentaire. Une fois qu'on est convaincu de cela, il conviendrait de se pencher sur la question du contenu à mettre dans la souveraineté économique, suite à l'entendement très déterminant par rapport à l'atteinte des objectifs potentiellement recherchés.

Sous un angle littéral, la souverainetééconomique devrait logiquement conduire à un retour vers une autarcie économico-financière. Seulement, cette approche mercantiliste conduirait sans équivoque le pays hors du système économique international. Une impasse économique qui, en définitive, serait contradictoire aux objectifs de souveraineté économique réellement recherchés.


Une "autonomie stratégique" pour éviter le piège de l'autarcie économique de l'autonomie économique 


Dans un monde moderne où le commerce inter-États est souvent le salut de la survie économique, l'autarcie au sens stricto sensu est en déphasage. L
’autonomie stratégique, version moderne de l’autarcie, est une approche intermédiaire et ad hoc, qui permet de contourner les risques de la souveraineté économique tel que le mercantilisme, pour ne pas dire l’obsessionpour le déficit de la balance commerciale. 

Ce qui reste à considérer et qui sert de base pour ne pas verser sur des challenges utopiques est de se rendre à l'évidence de quelques réalités et de s'en appuyer pour une stratégie plus efficace. Comprendre d'abord qu'aucun pays ne possède la totalité des ressources dont il a besoin, et qu'il doit donc accepter une forme de dépendance. Une dépendance raisonnable naturellement ! Et ça aussi pour la réussir, il faut un minimum d'efforts endogènes. Ce à quoi correspond l'appel du Chef de l'Etat, à savoir renforcer la création de valeur par la production et productivité locale. Depuis 2012 pour ne pas dire 2000, le Sénégal a activé les leviers de base lui permettant de pouvoir procéder à une réinvention - ne serait-ce que partielle - de son économie. Le levier le plus efficace se trouve du côté des réformes structurelles, puis au niveau d'une politique d'aide ciblée (ou de protection). Si la première a été enclenchée au Sénégal et porte déjà ses fruits, la seconde ne trouve pas de terreau pouvant lui servir de réceptacle pour la simple raison que les secteurs sont peu ou pas du tout organisés. Difficile d'apprécier convenablement un secteur pour identifier les vrais besoins, mettre en place une politique et apprécier son coût.

Une aide publique (ou une protection) n'entretient pas éternellement un secteur, peut se justifier temporairement si elle permet de descendre le long de la courbe d’expérience, de se moderniser, d'emprunter un raccourci pour combler un gap. On aura beau théorisé, mais les belles expériences économiques à travers le monde ont démontré que les secteurs peu ou pas organisés ne peuvent être pris en charge et tirés vers le haut. 



La souveraineté stratégiquepasse par l'édification de fédérations sectorielles et un patronat unis et forts.

Des secteurs forts et un patronat uni sont gages de progrès multidimensionnels pas seulement dans la création de valeur, mais dans la réflexion et les conditionnements des politiques sectorielles, industrielles, dans la formation professionnelle, l'employabilité des jeunes, mais aussi dans la création d'emplois. Les fédérations sectorielles peuvent valeureusement se positionner en organes ressources pour les politiques publiques, en clusters boosters, en passerelles professionnelles pour les jeunes, en organes consultatifs pour l'État pour les besoins précités et dans le cadre même de la continuité de la convention Etat-Employeurs. Au Sénégal, plusieurs secteurs sont sous exploités, plombés à la base par un défaut de vision, de politique sectorielle, de manque d'organisation et de soutien. Ce que réussissent la Fédération sénégalaise d'électricité (Feselec) ou encore l'Organisation des professionnels des TIC (Optic) - s'inspirant du modèle marocain - sont très rares au Sénégal. Et là encore deux associations plus structurées ne suffisent point pour disposer d'un patronat fort et organisé. Ni le Mouvement des entreprises du Sénégal (MEDS)ou encore le Conseil national du patronat (CNP).Dire encore que le chemin est encore long. Long mais pas impossible. Les secteurs et filières doivent s'organiser avant que l'État ne décide de les accompagner ou non.

Pourquoi les banques africaines doivent investir dans l’intelligence économique

Dans un monde dominé par l’accélération technologique, la guerre de l’information et la compétition asymétrique, les banques africaines n’on...